13 mai 2014

La Société d'Aujourd'hui?

Chacun est persuadé qu’il est libre d’organiser son destin, d’acheter tel téléphone portable, d’emprunter à la banque pendant 30 ans pour s’acheter un petit appartement, de regarder n’importe quelle émission stupide à la télévision.
(Monique Pinçon-Charlot, Sociologue)

J'ai lu cette phrase aujourd'hui, dans une interview de cette sociologue, à la sauce "lutte des classes". Je ne vais pas commenter l'ensemble de l'article, mais je voulais m'arrêter sur cette citation en particulier parce qu'elle mène à se poser des questions sur nos choix de vie.


La "Réussite Sociale"

Ce modèle de réussite sociale "consumériste", où il faut s'équiper des dernières nouveautés, s'endetter pour acheter une maison, travailler comme un chien toute sa vie pour la rembourser, et passer ses loisirs au centre commercial ou devant la télé, rend-il vraiment heureux? Est-ce vraiment ce à quoi nous devrions aspirer, avec option Rolex avant cinquante ans, de préférence?

Un autre article, de rue 89 cette fois-ci, remet également en question ce modèle de réussite sociale en parlant de ces trentenaires déprimés qui ne veulent plus se lever pour aller bosser. De classe sociale plutôt moyenne à haute, ces jeunes suivent les rails de manière exemplaire: bac S, prépa, école, boulot de cadre. On leur avait promis le bonheur au bout, ils ont tout fait comme il faut et ils l'attendent toujours.

Certains d'entre eux, les déclassés de la France, se retrouvent avec des boulots très prenants, aussi bien en termes de temps que d'énergie avec les responsabilités et le stress, mais des salaires leur permettant à peine de payer leur loyer et leurs factures. C'est vrai que dans ces cas-là, on peut se demander quelle partie de cette équation "ni temps, ni argent" rend heureux.

Quelle Alternative?

Si cela ne rend pas heureux, d'acheter, s'endetter, travailler pour rembourser, attendre la retraite, pourquoi est-ce l'option par défaut dans nos vies? Monique Pinçon-Charlot explique que nous sommes conditionnés de cette façon dans notre représentation du monde, formatés pour penser que c'est la meilleure option et qu'on l'a quand même choisie librement.

Ce discours se rapproche beaucoup d'Henri David Thoreau, et son idée que de louer ou acheter un appartement, l'argent nécessaire pour le meubler, puis tous les objets que nous achetons pour être bien habillés, à la pointe, nous asservit dans la société en nous forçant à dépenser tout cet argent, et donc à le gagner en premier lieu. Au milieu du XIX° siècle, il abordait déjà le sujet en ces termes dans Walden ou La Vie dans les Bois.

Sa prescription était de n'avoir besoin que de très peu, de mener sa vie avec le strict nécessaire afin de réellement garder sa liberté. Il a d'ailleurs appliqué ce précepte à la lettre, à l'époque où il a vécu dans les bois. Il a construit sa propre cabane, cultivait son jardin, avait très peu de meubles et de vêtements et ne dépensait donc que très peu d'argent chaque mois.

Ceci dit, ce modèle est difficilement applicable aujourd'hui, déjà parce qu'on n'a pas le droit de construire une maison à la sauvage dans les bois sans acheter le terrain qui va avec, ensuite parce que la plupart d'entre nous n'a pas les compétences nécessaires, ni pour construire une maison, ni pour entretenir un jardin. Sans parler du fait que peu d'entre nous accepteraient de vivre sans le confort de la vie moderne - eau courante, électricité...

La question que je me pose aujourd'hui est: quelle alternative avons-nous? Doit-on se résigner au "métro, boulot, dodo" afin d'avoir accès au confort moderne de vie et rester intégré dans la société ? Quels choix peut-on faire pour apporter un équilibre dans notre vie, se développer en tant qu'êtres humains tout en subvenant à nos besoins?

Le "minimalisme" moderne

Je pense que je me suis tournée vers le mouvement minimaliste car il apporte un début de solution à ce problème. Le "minimalisme" moderne propose de remettre en question le modèle social classique de "travailler plus pour gagner plus" - et surtout pour dépenser plus.

Un minimaliste moderne n'est pas, à mon sens, un nouveau Thoreau qui construit une cabane dans les bois et vit de champignons et d'eau fraîche - même s'il existe des minimalistes voyageurs qui se contentent d'un sac à dos. Les minimalistes qui m'intéressent sont ceux qui appliquent leur principe dans notre société actuelle, qui gardent leurs relations avec leurs proches et ne refusent pas le confort moderne.

Le principe de base du minimaliste moderne ressemble au concept de Thoreau ceci dit: garder un maximum de liberté en limitant à la fois le nombre de possessions personnelles et le montant de nos dépenses. Le minimaliste moderne remet en question l'achat du dernier iPhone ou du vêtement à la mode, définit ce qui lui est nécessaire et s'en contente. Le temps et l'argent ainsi libérés permettent de se consacrer davantage à ce qui compte vraiment, que ce soit la famille, un loisir, une activité, un projet personnel...


Maintenant, la question que je me pose est: comment aller plus loin? Dépenser moins est un bon début, mais quand on a déjà un salaire de jeune actif et que le loyer en coûte 40%, la marge de manoeuvre reste limitée. De même pour "travailler moins". Pour de nombreux postes, c'est 40 heures ou rien. Alors, quelle est la solution? Déménager dans une région avec un loyer moindre? Se tourner vers des emplois qui permettent de travailler moins afin d'avoir le temps de développer des projets personnels? La question est ouverte...

4 commentaires:

  1. Pour ma part, je vis en Province, ce qui limite déjà la part du budget consacré au loyer. J'ai un travail fixe à mi-temps, que je complète par quelques heures en plus. Je suis heureuse du temps libre que j'ai pour réfléchir, penser à penser, ou me dresser un projet pour améliorer encore mes conditions de vie pour l'année prochaine (faire plus... de ce que j'aime?) voilà peut être un élément de réponse :)

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    1. Merci beaucoup pour ce premier élément de réponse! C'est toujours intéressant de voir comment d'autres personnes approchent ce genre de choix de vie. Je ne sais pas si dans mon domaine professionnel, je vais pouvoir trouver un boulot à mi-temps facilement, mais déménager en province pourrait être un premier pas pour avoir besoin de moins dépenser, en effet :)

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  2. Bonjour,
    Je découvre ton blog et cet article me parle beaucoup. Je n'ai pas de réponse. J'y réfléchi justement. Je fais parti de ces jeunes cadres qui ne veulent pas se lever pour aller travailler. ;-) (même si je n'ai pas encore 30 ans.)
    Avec mon compagnon, nous avons commencé un début de reflexion et mis en place quelques petites choses déjà pour avoir une vie plus proches de nos valeurs: énooorme tri dans la maison (1 an qu'on est dessus et on a pas fini!), végétarisme, sport, déménagement... On va doucement vers un minimalisme moderne à notre sauce. Je suis un peu freinée par mon chéri, si ça ne tenait qu'à moi, beaucoup plus de choses partiraient. On a commencé un potager. Et bien c'est plus dur que ça en l'air. ça pousse si ça a envie! ^^
    Quand je regardes deux ans derrière moi, je me dis que j'ai bien avancé. Et même temps, il y a encore tellement que j'aimerais changer. Maintenant se pose la question du boulot. Changer complètement? Commencer une formation dans un autre domaine? Demander un 80%? Je suis déjà celle qui part tôt (comprendre que je fais mes heures et c'est tout) donc peur d'être mal vue... Beaucoup d'intérrogation et pour le moment, peu de réponses de trouvées.

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    1. Bonjour,
      Je viens de voir ton commentaire en relisant les archives, merci beaucoup pour ce témoignage! Je ne sais pas si tu auras l'occasion de voir ma réponse. C'est intéressant de voir que ce genre de questionnement s'accompagne d'une redéfinition des valeurs autres que professionnelles (la santé, le sport, la nourriture...), ce qui est mon cas également. C'est vrai que le coeur de la question, autour de la vie professionnelle et de la façon dont nous occupons notre temps, est difficile à dénouer. Peut-être que les choses ont avancé pour toi depuis? De mon côté le questionnement continue, faisant partie de ces jeunes cadres mal payés qui n'ont ni temps, ni argent, et l’impression de sacrifier ma vie à l'entreprise sans vraiment en voir de bénéfices pour moi-même...

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